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S'entraîner en altitude en ski de fond
Une mode, une nécessité ? Quels bienfaits ? Quelles limites ?

>>> publié le 15 novembre 2015 par Brunus Legrand - DEA Sport et performance

La mouche du coach !
 

S'entraîner en altitude est une pratique courante. Cette pratique, souvent organisée sous forme de stage, pose tout de même plus de questions qu'elle n'apporte de réponses. Les stages généralement d'une semaine pour les clubs et les comités, deux à quatre semaines pour les sélections nationales présentent un coût certain pour des finances associatives. Est-ce pour cette raison qu'on ne veut y voir que des avantages en gommant ou en ignorant les inconvénients ? Alors, faut-il s'y jeter sans réfléchir en se disant que si les meilleurs mondiaux le font il faut le faire ? Nous allons ensemble balayer les plus importantes modifications provoquées par l'exercice en altitude, les positives comme les négatives.

Au préalable rappelons que s'entraîner comporte des aspects bio-positifs, les transformations facilitant l'exercice physique voire provoquant une baisse de la pénibilité mentale perçue par le sujet, et des aspects bio-négatifs fatigues et blessures, voire une saturation psychologique. L'art de l'entraînement consiste donc à conserver le traces bio-positives liées à l'entraînement tout en minimisant les traces bio-négatives.

Tout d'abord, s'entraîner en plaine ou en altitude pose la même difficulté adaptative pour l'organisme répondre à l'accroissement de la demande en oxygène* (le gros mot est dioxygène). L'organisme se trouve en manque* (le gros mot est hypoxie) et peu importe que cette difficulté adaptative soit provoquée par l'accroissement de l'intensité de l'exercice ou par la raréfaction* (le gros mot est baisse de la pression partielle) de l'oxygène, en effet l'air ne contient pas moins d'oxygène simplement il est présent à une moindre pression. Il est donc moins facilement utilisable par l'organisme. Dans le premier cas en plaine l'organisme est en dette d'O2 dans le deuxième en altitude il est en hypoxie du fait d'une moindre saturation de l'hémoglobine*.

Certains préparateurs ont eu l'idée de simuler les effets de l'altitude par des caissons de moindre pression* (hypobare) ou de raréfaction de l'oxygène* (chambre à hypoxie) les effets sont à peu près les mêmes sur l'organisme une surproduction de globules rouges due à la production intérieure* (endogène) d'EPO* (ErytroPOïétine). On sait aujourd'hui que beaucoup ne s'embarrassent plus de stages en altitude, qui présentent certains inconvénients, leur préférant des injections extérieures* (exogènes) d'EPO.

En somme la dette d'O2 provoque des adaptations structurelles et fonctionnelles, meilleure capillarisation, accroissement du nombre et de la taille des centrales énergétiques *(mitochondries) contenues dans les muscles, meilleure affinité et meilleure dissociation du couple O2 hémoglobine, stimulation des systèmes chimiques* (enzymatiques) de production de l'énergie. Le tout aboutit à une diminution de la distance de perfusion entre les cellules et les capillaires à une meilleure utilisation des lipides épargnant ainsi les glucides, à une meilleure tolérance aux lactates mais surtout à un meilleur recyclage des ces lactates*(non ce n'est pas un poison ni une toxine c'est juste une forme d'énergie pour faire face temporairement au manque d'o2).

Dans le cas de l'altitude l'organisme ne méconnaît pas ces transformations adaptatives simplement elles sont moins stimulées du fait d'une réduction des allures d'entraînement et du fait d'une production précoce de lactates lesquels ont un effet inhibant sur la contraction musculaire. Il y aurait ainsi une sorte de sagesse musculaire (Enoka et coll. 1992) qui nous protégerait d'une trop grande fatigue nerveuse* (centrale). L'organisme fait prioritairement face à l'hypoxie d'altitude par une production supplémentaire de globules rouges* hématies. Et c'est ce miracle là qu'on vient chercher en altitude
 

Malheureusement l'accroissement du nombre de globules provoque une viscosité plus importante du sang lequel circule* (perfuse) moins bien vers les tissus. De plus le globules produits ne sont pas tout à fait les mêmes ils s'équipent d'une petite molécule qui change leur forme, ils sont fait pour fonctionner en altitude, pas en plaine. Du coup «bénéfice net rendement nul».

La seule vraie différence entre la plaine et l'altitude c'est l'assèchement de l'air lequel provoque une déshydratation donc une plus grande viscosité du sang et une souffrance du cerveau*(encéphale). Le cerveau est particulièrement sollicité en altitude laquelle provoque généralement une hyperventilation qui conduit en plus de l'hypoxie à une baisse de la pression partielle de CO2*(hypocapnie) le cerveau se trouve alors piégé dans une contradiction d'information d'augmentation du débit sanguin*(vasodilatation) et information de réduction du débit sanguin*(vasoconstriction) le problème de notre cher cerveau est qu'il est contenu dans une boîte aux dimensions constantes l'afflux sanguin cause douleurs et oedèmes*(Mal Aigu des Montagnes) il est également prioritaire et il est très sensible et à la baisse de la glycémie et à la déshydratation. Deux phénomènes se conjuguent alors une altération de la motricité et une réduction de la vitesse d'entraînement. Il n'est donc pas certain que les acquis techniques que le skieur vient chercher sur la neige d'altitude soient transférables en moyenne montagne à vitesse de compétition. « Bénéfice net rendement toujours nul».

 

Interrogeons-nous maintenant sur la durée du stage. L'acclimatation à l'altitude n'est réelle qu'à partir d'une semaine. La première phase aiguë ne devrait donc être utilisée qu'à des exercices de faible intensité, balade et footing, sorties ski très lentes. Les semaines deux et trois pourraient alors être utilisées pour accroître progressivement la quantité et l'allure des entraînements. La quatrième semaine permettant des allures d'entraînement proches de celles réalisées en plaine serait vraiment productives. Le stage d'une semaine par souci de rentabilisation du déplacement serait donc trop intense et n'aboutirait qu'à une forme de surentraînement ou en tout cas à l'installation de nombreuses traces bio-négatives les traces bio-positives n'ayant pas eu le temps de se mettre en place. « Bénéfice net rendement nul ».

Si le stage est efficace les effets sont-ils durables ? Il y a consensus entre les différentes études pour dire que les traces positives persistent environ trois à quatre semaines. Pour ceux qui préparent une compétition importante le délai optimum pour placer la compétition semble être de quelques jours après la descente en plaine 3 à 4 ou 14 à 21 jours. La période la plus néfaste semble être la période intermédiaire de 5 à 14 jours. Passé ce délai de trois à quatre semaines l'organisme est de retour à son état initial.

Quelques études divisent la population de bons et en mauvais répondeurs les résultats sont flous et les bons répondeurs d'une année ne sont pas forcément les mêmes l'année suivante ce qui relativise la portée de ces études. Un consensus se dégage quant à la pertinence de l'entraînement en altitude pour préparer une compétition en altitude. Là encore il faut jouer fin soit on arrive de la plaine quelques heures avant la compétition en altitude pour éviter la phase aiguë d'acclimatation, soit on arrive un mois avant. Les autres délais sont inopérants. Enfin il n'y aurait aucun intérêt à s'entraîner en altitude pour préparer une compétition en plaine. Quelques auteurs et quelques entraîneurs se sont interrogés sur d'autres modalités de mise en œuvre, s'entraîner bas et vivre haut. Ou l'inverse s'entraîner haut et vivre bas. Plusieurs études militent en faveur du s'entraîner bas et vivre haut, l'idée est alors de cumuler les avantages de l'entraînement en plaine sans les effets négatifs* (délétères) de l'altitude et de profiter durant la nuit des effets positifs de l'altitude, la production massive de globules. On se souvient d'Hervé Balland, et de ses nuits au sommet des remontées de Tignes et, qui redescendait s'entraîner à 2000, tout de même. Pauvre Hervé qui devait faire face aux nordiques et aux athlètes de l'est dans la pire période de l'utilisation de l'EPO dans le ski de fond et le cyclisme etc...

 

Se pose alors de la question de l'altitude optimale ? L'altitude 3000m semble être une limite supérieure pour ne pas exposer l'organisme inutilement. En dessous de 1500m les effets sont insignifiants il y a consensus pour une efficacité maximale obtenue entre 2100 et 2500.

Mais la question de l'entraînement ne se résume pas à la production de globules, dans ces stages on y tisse des liens, on y renforce sa motivation à faire des séances de ski-roues l'été, car on se prépare à monter pour faire du vrai ski, on redescend rassuré si on a été un peu raisonnable et encore plus motivé pour s'entraîner avec les bâtons ou sur les skis roues. En attendant le deuxième stage ou l'hiver tout proche, on se dépayse on casse la routine. On s'endurcit en enchaînant les séances, en bravant le froid, le vent, on y apprend l'équilibre*(la proprioception) en glissant sur des neiges soufflées, ondulées, cartonnées. On se prend pour un vrai champion parce qu'à bloc au bout de trois km on dépasse le meilleur norvégien qui en est déjà au 50°km ou à sa troisième séance du jour. Hé oui il est déjà monté le matin tôt en ski roue depuis la plaine car lui dort parfois en bas. Ou alors on le croisera à la frontale quelques heures plus tard en train de monter de nuit au refuge car celui là dort en haut. Surtout on reprend contact avec la neige, car le ski roues a ses limites aussi et le toucher de neige ça c'est irremplaçable. Pour les masters j'oubliais, n'oubliez pas de trinquer avec une bonne bière car cela recule indubitablement la mise en bière ! La bonne humeur est encore le meilleur anti-oxydant contre les radicaux libres.


 

 

En conclusion :

Pour des athlètes de haut niveau, les études les plus récentes militent pour le vivre haut et s'entraîner bas, même si un effet placebo serait suggéré, les effets semblent faibles sur des athlètes déjà entraînés et qui disposent d'une masse d'hémoglobine déjà importante.

Pour des sportifs récréationnels, si l'on ne s'y présente pas trop naïf et pas trop enthousiaste quant à ses capacités du moment, si l'on y arrive pas trop crédule quant aux effets espérés le stage en altitude peut être positif mais pas toujours pour les raisons pour lesquelles on y était venu au départ.

Il ne faut pas non plus en méconnaître les risques. Une fois de plus l'abus n'interdit pas l'usage*(Abusus non tollit usum »

 

 

Coach Brunus
Article écrit pour l'association des masters. Bruno Legrand DEA sport et performance mention physiologie UCBL Lyon 1

 

Références :

Enoka 1992

Richalet 2005 et nombreuses publications

Guezennec 2005 et nombreuses publications

Schmitt 2006

Schmitt 2008

Millet 2010

 

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